Nouveau rapport : « Revenir vers la stabilité ? Retours de réfugiés dans la région des Grands Lacs »


Published: 16 Oct 2019
By: IRRI, CRG, APRu & GEC-SH

 

Après des décennies de conflit et de violence, la région africaine des Grands Lacs demeure une des zones du monde les plus touchées par le déplacement forcé. La plupart des pays de cette région accueillent des réfugiés, mais voient aussi leurs propres ressortissants chercher refuge dans les pays voisins.

Le rapatriement volontaire est généralement considéré par les acteurs régionaux et internationaux comme la meilleure solution à ces crises de déplacement. Mais lorsqu’ils rentrent chez eux, les migrants de retour trouvent rarement la stabilité et la sécurité, d’autant que la migration de retour peut elle-même compliquer la situation dans les zones de retour.

Ce nouveau rapport décrit en quoi le retour des réfugiés a affecté la dynamique des conflits et leurs relations avec les autorités locales en république démocratique du Congo et au Burundi. En s’appuyant sur des recherches de terrain approfondies dans le sud-ouest du Burundi, à Faradje (nord-est de la RDC) et à Kalehe (est de la RDC), il analyse ce que signifie le retour – que ce soit pour les personnes qui reviennent ou celles qui n’ont pas migré. Outre la logistique nécessaire pour franchir la frontière et la satisfaction des besoins matériels immédiats, le rapport analyse les répercussions des interventions des organisations internationales et de leurs partenaires locaux sur la politique du retour.

  • À Faradje (province du Haut-Uélé), les recherches étaient axées sur le retour des réfugiés congolais qui avaient fui l’Armée de résistance du Seigneur (ARS) en 2009 et sont revenus lors d’une flambée de violence au Soudan du Sud. Les problèmes de sécurité, les frustrations suscitées par l’aide extérieure et les contestations entre formes d’autorité établies et nouvellement apparues continuent à générer des frictions.
  • À Kalehe (province du Sud-Kivu), un retour anticipé de plus grande ampleur de réfugiés tutsi congolais provoque la nervosité de différentes communautés. Les migrants de retour sont susceptibles de réclamer leurs terres, ce qui déclenche des litiges avec les autres communautés. Par ailleurs, la citoyenneté et la nationalité des migrants revenant du Rwanda sont remises en cause, ce qui porte atteinte à leur capacité de réclamer leurs terres et de réintégrer la société.
  • Au Burundi, les recherches se sont penchées sur la vague de retours la plus récente, celle des citoyens ayant fui en Tanzanie après la crise de 2015. Même si les migrants de retour bénéficient d’une certaine solidarité et de l’aide d’autres communautés, ils se heurtent également à la méfiance et l’exclusion socio-politique. Comme rien n’a fondamentalement changé, entre leur exil et leur retour, dans la situation économique et politique, les migrants de retour sont particulièrement vulnérables. Enfin l’aide extérieure est un facteur de tensions sociales dans les zones de retour.

Les modalités de retour des réfugiés différaient beaucoup d’un cas à l’autre. Au Burundi, la plupart étaient revenus dans le cadre d’un accord tripartite entre le Burundi, la Tanzanie et le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies (HCR). Autant à Kalehe qu’à Faradje (RDC), les réfugiés sont revenus sans le cadre d’un accord et en recevant peu d’assistance. Les ressources humanitaires sont devenues un enjeu important dans la politique du retour.

Le rapport décrit aussi les effets des différentes situations socio-politiques, au Burundi et en RDC, sur le processus de retour. Contrairement au Burundi, où la présence de l’État et du parti au pouvoir est forte, l’État est peu présent en RDC. À Kalehe, la présence de groupes armés contribue à une scène politique fortement militarisée, ce qui n’est pas le cas à Faradje. Ces différences de configuration politique ont un impact sur le rôle que jouent les organisations internationales dans les retours de réfugiés.

En dépit de ces importantes différences, chacune des trois études de cas souligne la nécessité de considérer les dimensions politiques et sociales du retour, et non pas seulement humanitaires et logistiques. Le retour est un processus fondamentalement politique qui affecte la légitimité et les relations de pouvoir. Le rapport plaide pour des approches du retour des réfugiés qui tiennent davantage compte des conflits et propose 12 enseignements en vue des interventions internationales.

Cette étude a été réalisée par un consortium comprenant International Refugee Rights Initiative (IRRI), le Groupe d’études sur les conflits et la sécurité humaine (GEC-SH), Actions pour la promotion rurale (APRu) et le Groupe de recherche sur les conflits (CRG).

Programmes: Resolving Displacement
Regions: Great Lakes Region, Burundi
Type: